Chers actionnaires,

Alors que je m’apprête à rédiger ma seconde lettre annuelle aux actionnaires en tant que PDG, je suis à la fois optimiste et enthousiaste quant à l’avenir d’Amazon. Bien que l’année 2022 ait compté parmi les plus difficiles récemment sur le plan macroéconomique, avec de surcroit des enjeux opérationnels, nous sommes tout de même parvenus à renforcer notre activité (en plus de la croissance sans précédent enregistrée pendant la première moitié de la pandémie). Nous avons innové dans nos principales activités pour améliorer véritablement l’expérience client à court et à long terme. Enfin, nous avons procédé à des ajustements importants dans nos décisions d’investissement, et dans la manière dont nous allons innover à l’avenir, tout en préservant les investissements à long terme qui, selon nous, ont le pouvoir de révolutionner l’avenir d’Amazon, au service des clients, des actionnaires et des collaborateurs. Si l’année écoulée a été marquée par un nombre inhabituel de défis simultanés, force est de constater que lorsqu’une entreprise est présente sur des segments de marché dynamiques d’envergure mondiale, et qu’elle doit composer avec une concurrence forte, compétente et bien financée (comme c’est le cas pour Amazon dans l’ensemble de ses activités), il est rare que les conditions restent figées très longtemps.

Au cours de mes 25 ans de carrière chez Amazon, l’entreprise a connu des évolutions constantes, pour la plupart initiées de l’intérieur. À mon arrivée en 1997, Amazon avait enregistré un chiffre d’affaires de 15 millions de dollars en 1996, ne vendait que des livres, ne disposait pas d’une place de marché de vendeurs tiers et ne livrait qu’aux États-Unis. Aujourd’hui, Amazon vend presque tous les articles physiques et numériques possibles et imaginables, avec un écosystème dynamique de vendeurs tiers qui représentent 60 % de ses ventes unitaires, et livre des clients quasiment partout dans le monde. De même, créer une activité axée sur un panel de services d’infrastructure technologique dans le cloud n’était pas évident en 2003 aux balbutiements d’AWS, et ne l’était toujours pas lors de son lancement officiel en 2006. Avant qu’Amazon commercialise le Kindle en 2007, il était impossible d’avoir accès à autant de livres en moins de 60 secondes, puis de les stocker et de les récupérer sur un lecteur numérique léger. Tout comme il était impossible d’accéder à des divertissements, de contrôler sa maison connectée, de faire des achats et de récupérer diverses informations à l’aide d’un assistant personnel à commande vocale, avant que le lancement d’Alexa par Amazon en 2014.

À certaines périodes, les conditions macroéconomiques ou des inefficacités opérationnelles ont représenté de véritables défis pour l’entreprise. Par exemple, lors de l’éclatement de la bulle Internet en 2001, nous avons dû obtenir des lettres de crédit afin d’acheter les stocks nécessaires pour la période de fin d’année et rationaliser les coûts afin d’améliorer notre rentabilité, tout en donnant la priorité au long terme et à l’expérience client ainsi qu’à l’entreprise que nous nous efforcions de développer (d’ailleurs, si vous vous en souvenez bien, en 2001, nous avons baissé les prix dans la plupart de nos catégories pendant cette période difficile). Ce schéma s’est répété en 2008-2009 du fait de la récession provoquée par la crise financière liée aux titres adossés à des créances hypothécaires. Amazon a alors pris plusieurs mesures pour maîtriser la structure de coûts et améliorer l’efficacité de ses boutiques, mais également compensé ces mesures de rationalisation en investissant dans des expériences client qui pouvaient constituer de futures activités importantes à l’origine d’excellents rendements pour les actionnaires. En 2008, AWS n’était encore qu’une petite activité en devenir. Certes, il y avait de l’idée, mais des investissements conséquents étaient tout de même nécessaires. Au sein et en dehors d’Amazon, d’aucuns se demandaient pourquoi Amazon (dont l’activité principale était alors le commerce en ligne) investissait autant dans le cloud computing. Or, nous étions convaincus d’être en train d’imaginer un service à part, à même d’apporter à terme une immense valeur pour les clients et pour Amazon. Malgré une longueur d’avance sur nos concurrents potentiels, notre but était surtout d’accélérer encore le rythme de nos innovations. Nous avons donc pris la décision à long terme de continuer d’investir dans AWS. Quinze ans plus tard, AWS enregistre désormais un chiffre d’affaires annuel de 85 milliards de dollars, avec une forte rentabilité, et a transformé la gestion des infrastructures technologiques des start-ups, des multinationales et même du secteur public. Amazon ne serait pas tout à fait la même entreprise en 2023 si elle avait ralenti le rythme de ses investissements dans AWS en 2008-2009.

Le changement est inévitable, qu’il vienne directement de l’intérieur, ou qu’il vienne frapper de l’extérieur. Mais quand on le voit arriver, il faut impérativement l’accepter. Les entreprises qui se tiennent à cette devise sur une longue période connaissent généralement le succès. Je suis optimiste quant à nos perspectives d’avenir, car j’apprécie la réaction de nos équipes face aux changements qui se présentent à nous.

Ces derniers mois, nous avons fait une revue approfondie de nos activités, et pour chaque initiative, en nous posant la question suivante : sommes-nous convaincus que tel ou tel projet peut, sur le long terme, générer un chiffre d’affaires, un résultat d’exploitation, des flux de trésorerie et un rendement du capital investi suffisants ? Dans certains cas, cette analyse nous a conduits à mettre fin à certaines activités. C’est notamment le cas pour certains concepts de commerces physiques tels que nos librairies (Amazon Bookstores) et boutiques 4-Star, mais aussi pour Amazon Fabric et Amazon Care, et certains autres services plus récents qui ne présentent pas de perspectives de rentabilité. Dans d’autres cas, nous avons analysé certains services dont la rentabilité était moins bonne qu’espérée (par exemple, la livraison gratuite pour les commandes alimentaires en ligne de plus de 35 $) et les avons modifiés. Nous avons également redéfini les priorités d’utilisation de nos ressources, ce qui nous a amenés à prendre la décision difficile de supprimer 27 000 postes au sein de l’entreprise. Nous avons procédé à de nombreux autres changements au cours des derniers mois pour rationaliser nos coûts au niveau global et, comme la plupart des dirigeants, nous continuerons à évaluer nos activités et à nous adapter en fonction.

Nous avons par ailleurs analysé attentivement nos modalités de travail en équipe et avons demandé à nos collaborateurs de revenir au bureau au moins trois jours par semaine, à partir de mai prochain. Pendant la pandémie, nos employés se sont organisés pour travailler de leur domicile et ont tout fait pour s’adapter aux circonstances inattendues qui se sont présentées. Ils ont été remarquables, et je suis fier de la façon dont ils se sont mobilisés pour relever les défis inédits auxquels étaient confrontés nos clients, les populations des territoires où nous sommes implantés et l’entreprise elle-même. Cependant, nous sommes convaincus que ce n’est pas la meilleure approche à long terme et que la collaboration et l’innovation sont plus efficaces quand on travaille en équipe et qu’on peut apprendre les uns des autres, en présentiel. L’énergie et les idées de chacun ont ainsi plus de liberté pour s’exprimer. Nombre des plus belles inventions d’Amazon ont vu le jour parce que des collaborateurs sont restés griffonner sur le tableau blanc après une réunion, ont continué à échanger sur un sujet ou sont passés voir un collègue avec une idée à l’esprit. Le processus d’invention est rarement linéaire, il est plutôt fait d’errements, de méandres et de maturation. Les interactions fortuites contribuent à l’innovation, et elles sont plus nombreuses en présentiel que virtuellement. Il est également beaucoup plus facile d’apprendre, de modéliser, de pratiquer et de consolider la culture d’entreprise quand on est au bureau, entourés de ses collègues. L’innovation et notre culture d’entreprise unique ont joué un rôle absolument majeur dans les 29 premières années d’existence d’Amazon et je compte bien que ce soit encore le cas pour les 29 prochaines années.

L’un des défis majeurs que nous continuons à relever est la hausse du coût du service dans notre réseau de centres de distribution de nos Boutiques (c’est-à-dire le coût d’acheminement d’un article Amazon à un client), et nous avons apporté plusieurs changements qui, selon nous, vont nettement faire baisser nos coûts de distribution et améliorer la rapidité des livraisons.

Au début de la pandémie, compte tenu de la fermeture de nombreux magasins physiques, notre activité grand public a connu une croissance spectaculaire, avec un chiffre d’affaires annuel passé de 245 milliards de dollars en 2019 à 434 milliards de dollars en 2022. Par conséquent, nous avons dû multiplier par deux les surfaces de centres de distribution déjà construites au cours des 25 années précédentes et accélérer nettement la mise en place d’un réseau logistique du dernier kilomètre désormais comparable à celui d’UPS (ainsi qu’un nouveau réseau de centres de tri pour plus de rapidité et d’efficacité pour les expéditions sur de longues distances), le tout en à peine deux ans. Cela n’a pas été une mince affaire et plusieurs centaines de milliers de collaborateurs ont travaillé d’arrache-pied pour y parvenir. Mais il n’est pas surprenant que, compte tenu du rythme et de l’échelle de ces évolutions, de nombreuses améliorations aient été nécessaires pour obtenir la productivité escomptée. Ces derniers mois, nous avons passé au crible chaque processus de nos centres de distribution et de notre réseau de transport, et repensé plusieurs dizaines d’entre eux, ce qui a conduit à des gains de productivité et à des réductions de coûts pérennes au cours des derniers trimestres. Il reste beaucoup à faire, mais nous sommes satisfaits de la trajectoire et des aspects positifs qui s’annoncent.

Nous avons également profité de cette occasion pour apporter des changements structurels plus importants, grâce auxquels nous allons pouvoir être prêts à livrer les articles plus rapidement et à moindre coût pendant de nombreuses années. Un bon exemple a été la refonte de l’organisation de notre réseau de centres de distribution aux États-Unis. Jusqu’à récemment, Amazon exploitait un seul réseau national de distribution aux États-Unis qui assurait l’expédition des articles depuis des centres de distribution répartis sur l’ensemble du territoire. Si un centre de distribution ne disposait pas d’un article commandé par un client, il fallait l’expédier depuis un autre centre, ce qui entraînait un surcoût et un allongement des délais de livraison. Ce problème s’est aggravé avec l’expansion de notre réseau de distribution, qui a accueilli plusieurs centaines de centres supplémentaires ces dernières années, entraînant une répartition des stocks sur un plus grand nombre de sites et une articulation plus complexe entre les centres de distribution et les dépôts de livraison. L’an dernier, nous avons commencé à réorganiser notre stratégie de répartition des stocks et à tirer parti de l’envergure de notre réseau de centres de distribution pour passer d’un réseau de distribution national à un modèle de réseau régionalisé. Nous avons procédé à d’importants changements internes (logiciels de répartition et de logistique, processus, opérations physiques) afin de créer huit régions interconnectées dans des zones géographiques plus restreintes. Chacune de ces régions dispose d’un stock important et pertinent pour fonctionner de manière autonome, tout en étant capable d’expédier des articles au niveau national si nécessaire. L’optimisation des liens entre ces nombreuses infrastructures a été l’un des défis les plus importants et les plus complexes à relever pour Amazon. Nous continuons également d’améliorer nos algorithmes avancés de machine learning afin de mieux anticiper les besoins des clients dans les différentes régions du pays, et de disposer ainsi des stocks les plus adaptés dans les bonnes régions, au bon moment. Nous avons récemment finalisé ce déploiement régional et sommes satisfaits des premiers résultats. Des distances de déplacement réduites entraînent des coûts de service plus faibles, un impact moindre sur l’environnement et une réception plus rapide des commandes pour les clients. Sur ce dernier point, nous sommes ravis de constater une hausse du nombre de livraisons le jour même ou à J+1 et en 2023, nous devrions atteindre les délais de livraison Prime les plus courts jamais enregistrés. Globalement, nous sommes confiants quant à notre capacité à diminuer les coûts, diminuer les délais de livraison et développer une activité de commerce de détail plus importante avec de bonnes marges d’exploitation.

L’activité AWS enregistre un chiffre d’affaires annuel de 85 milliards de dollars, en est encore au début de sa courbe d’adoption, et se trouve à un moment charnière, où il faut impérativement rester attentif aux besoins des clients sur le long terme. Malgré une croissance de 29 % sur 12 mois glissants en 2022 (sur la base d’un chiffre d’affaires initial de 62 milliards de dollars), AWS subit actuellement des vents contraires, avec des entreprises plus frileuses dans leurs dépenses compte tenu des conditions macroéconomiques actuelles difficiles. Si certaines entreprises, en cette période incertaine, peuvent faire le choix de se concentrer sur la façon d’obtenir le plus de revenus possibles de leurs clients, ce n’est pas une solution bénéfique sur le long terme. C’est pourquoi nous privilégions une autre approche. Quand une entreprise se développe grâce à AWS et au cloud computing, elle peut augmenter ses capacités de manière continue et, à l’inverse, si son activité se réduit, elle peut choisir de restituer à Amazon les capacités inutilisées et ne plus les payer. Cette flexibilité est propre au cloud computing et n’existe pas lorsque vous avez déjà réalisé des investissements coûteux dans vos propres datacenters, serveurs et équipements de réseau sur site. Avec AWS, comme dans toutes nos activités, le but n’est pas d’augmenter le chiffre d’affaires du trimestre ou de l’année, mais d’établir des relations avec nos clients (et une activité) pérennes. Nos équipes de vente et d’assistance AWS consacrent donc une grande partie de leur temps à aider les clients à optimiser leurs dépenses AWS afin qu’ils puissent mieux faire face à cette économie incertaine. D’après nombre de ces clients AWS, l’objectif n’est pas tant de réduire les coûts que de les optimiser pour consacrer leurs ressources au développement de nouvelles expériences client. De leur côté, ils apprécient cette approche à long terme axée sur le client, tandis que pour Amazon, cette démarche est de bon augure à la fois pour les clients et pour AWS.

Malgré l’impact de ces conditions défavorables à court terme sur la croissance de l’activité, les fondamentaux d’AWS ont de quoi donner du baume au cœur. Nous disposons d’un influx régulier de nouveaux clients et d’un nombre important de migrations actives. De nombreuses entreprises profitent de périodes en dents de scie comme celle que nous traversons pour prendre du recul et identifier de nouvelles stratégies, ce qui nous amène à un constat : de plus en plus d’entreprises choisissent de ne plus gérer leur propre infrastructure et préfèrent migrer vers AWS pour bénéficier de l’agilité, de l’innovation, de la rentabilité et de la sécurité qu’offrent nos solutions. Point important pour les clients, AWS continue de mettre en place rapidement de nouvelles fonctionnalités (plus de 3 300 fonctions et services nouveaux lancés en 2022) et d’investir dans des innovations à long terme pour faire évoluer AWS autant que possible.

Le développement de processeurs en est un bon exemple. L’an dernier, dans ma lettre aux actionnaires, j’ai mentionné notre investissement dans les processeurs « Graviton ». Les instances de calcul basées sur Graviton2 offrent un rapport prix-performance jusqu’à 40 % supérieur à celui des processeurs x86 dernière génération comparables. En 2022, nous avons même commercialisé nos processeurs Graviton3, aux performances 25 % supérieures à celles des Graviton2. En outre, avec l’accélération continue du recours au machine learning, les clients souhaitent disposer de processeurs graphiques à moindre coût (les plus couramment utilisés pour le machine learning). AWS a commencé à investir il y a plusieurs années dans ces processeurs spécialisés pour la formation au machine learning et l’inférence (c’est-à-dire, les prédictions ou les réponses fournies par un modèle de machine learning). Nous avons commercialisé notre premier processeur d’entraînement (« Trainium ») en 2022 : pour les modèles de machine learning les plus courants, les instances basées sur Trainium sont jusqu’à 140 % plus rapides que celles reposant sur des processeurs graphiques, pour un coût jusqu’à 70 % inférieur. La plupart des entreprises en sont encore au stade de l’entraînement, mais lorsqu’elles développent des modèles qui passent à une production industrielle, elles se rendent compte que la majeure partie du coût concerne le processus inférentiel; en effet, les modèles sont entraînés périodiquement, alors que les inférences ont lieu en temps réel, au fur et à mesure de l’utilisation de l’application qui leur est associée. Nous avons lancé en 2019 nos premiers processeurs d’inférence (« Inferentia »), qui ont déjà permis à des entreprises comme Amazon d’économiser plus de cent millions de dollars d’investissement. Notre processeur Inferentia2, qui vient d’être commercialisé, propose un débit jusqu’à quatre fois plus élevé et une latence dix fois plus faible que le processeur Inferentia de première génération. Au vu de l’immense croissance à venir du machine learning, les clients vont pouvoir en faire beaucoup plus avec les processeurs d’entraînement et d’inférence d’AWS, et ce à un coût nettement inférieur. Nous sommes loin d’avoir fini d’innover, et cet investissement à long terme devrait s’avérer fructueux à la fois pour les clients et pour AWS. L’activité AWS n’en est encore qu’au début de son parcours et devrait connaître une croissance exceptionnelle dans les dix prochaines années.

Autre segment à fort potentiel, l’activité publicitaire d’Amazon est particulièrement performante pour les marques, ce qui explique en partie le rythme soutenu de sa croissance. À l’instar des activités publicitaires des enseignes physiques qui vendent de l’espace en rayon, des présentoirs et des emplacements dans leurs prospectus, nos offres de liens sponsorisés font partie intégrante de l’expérience d’achat d’Amazon depuis plus de dix ans. Cependant, contrairement aux enseignes physiques, Amazon peut adapter ces liens sponsorisés en fonction de ce que les clients recherchent, grâce à nos connaissances des comportements d’achat et à un investissement plus important dans les algorithmes de machine learning. La publicité est ainsi plus pertinente pour les clients et donc plus performante pour les marques. C’est l’une des raisons qui explique la croissance rapide et continue du chiffre d’affaires de notre activité publicitaire (23 % sur 12 mois glissants au 4e trimestre 2022, 25 % sur 12 mois glissants sur l’exercice 2022, sur la base d’un chiffre d’affaires initial de 31 milliards de dollars), dans un contexte de ralentissement de la croissance chez les grandes régies publicitaires sur plusieurs trimestres consécutifs.

Amazon s’efforce d’être la meilleure solution pour aider les annonceurs à développer leur marque. Nous avons mis en place des projets à court et à long terme pour nous aider à accomplir cette mission. Nous continuons d’investir massivement dans le machine learning afin de perfectionner nos algorithmes de sélection des publicités. Ces deux dernières années, nous avons investi dans la mise en place de solutions de planification et d’évaluation complètes, flexibles et durables, permettant aux annonceurs de mieux comprendre la performance d’une publicité. Amazon Marketing Cloud (« AMC ») en est un exemple. Il s’agit d’une « clean room » (c’est-à-dire un environnement numérique sécurisé) dans laquelle les annonceurs peuvent effectuer des analyses d’audience et de campagne personnalisées à partir d’un éventail de données directes ou provenant de tiers, dans le respect de la vie privée, afin de mieux éclairer leurs stratégies marketing et commerciales.

Les équipes Advertising et AWS ont collaboré ensemble pour permettre aux entreprises de stocker leurs données dans AWS, d’opérer AMC en toute sécurité avec des sources de données Amazon et tierces, d’effectuer des analyses dans AWS et de pouvoir activer la publicité sur Amazon ou chez des éditeurs tiers par l’intermédiaire de l’Amazon Demand-Side-Platform (plateforme de gestion de la demande). Les clients apprécient beaucoup ces capacités conjuguées. Nous réfléchissons également à l’éventualité, à l’avenir, d’intégrer de manière réfléchie la publicité dans nos produits vidéo, de sport en direct, d’audio et d’alimentation. Nous continuerons à travailler d’arrache-pied pour aider les marques à toucher de manière unique le public qui les intéresse et pour développer ce pan de notre activité.

S’il peut sembler tentant, dans les périodes de turbulence, de se focaliser sur ses grandes activités existantes ; pour afin bâtir une entreprise durable, pérenne et en pleine croissance, il n’est pas envisageable d’arrêter d’inventer et de réfléchir à des expériences client sur le long terme, susceptibles d’impacter favorablement les clients et et l’entreprise.

Lorsque nous étudions de nouvelles opportunités d’investissement, nous nous posons les questions suivantes :

  • Si l’investissement réussit, peut-il s’agir d’un projet d’envergure offrant un bon rendement par rapport au capital investi ?
  • Cette opportunité est-elle déjà saisie actuellement ?
  • Avons-nous une approche différenciée ?
  • Enfin, avons-nous les compétences nécessaires dans ce domaine ? Sinon, pouvons-nous les acquérir rapidement ?

Si les réponses à ces questions nous conviennent, alors nous investissons. Cette démarche a donné lieu à certains investissements qui semblaient évidents, mais aussi à d’autres que certains n’auraient pas imaginés au départ.
L’exemple le plus ancien est lorsque nous avons décidé d’élargir notre offre au-delà de la vente de Livres pour proposer aussi de la musique, de la vidéo, de l’électronique et des jouets. À l’époque (1998-1999), cette décision n’était pas du goût de tous, mais avec le recul, elle semble assez évidente.

Il en va de même du développement de nos Boutiques à l’international. En 2022, notre chiffre d’affaires grand public à l’international a atteint 118 milliards de dollars. Dans nos activités internationales bien établies de manière générale, nous occupons une part de marché assez importante pour subir le ralentissement des conditions macroéconomiques. Or, en 2019-2021, la croissance a été remarquable : + 30 % de taux de croissance annuel composé (TCAC) au Royaume-Uni, + 26 % en Allemagne et + 21 % au Japon (hors effets de change). Ces dernières années, nous avons investi dans de nouvelles zones géographiques à l’international, notamment en Inde, au Brésil, au Mexique, en Australie, dans plusieurs pays européens, au Moyen-Orient et dans certaines régions d’Afrique. Ces nouvelles zones ont besoin d’un certain nombre d’investissements fixes pour démarrer et se développer, mais elles sont sur la bonne voie et leur trajectoire de croissance est proche de celles observées en Amérique du Nord et dans nos zones géographiques internationales déjà établies. Les pays émergents manquent parfois d’infrastructures et de services dont dépendent nos activités (p. ex. moyens de paiement, services de transport et infrastructures Internet/télécom). Pour relever ces défis, nous continuons de collaborer avec différents partenaires pour proposer des solutions à nos clients. En définitive, nous sommes convaincus qu’investir pour être mieux implantés géographiquement nous permettra de répondre aux besoins d’un plus grand nombre de clients à travers le monde et de développer une activité grand public à même de générer des flux de trésorerie disponibles plus importants.

Outre l’expansion géographique, Amazon s’est efforcé de développer ses offres de produits sur plusieurs grands segments de la vente de détail aux particuliers. Rien qu’aux États-Unis, le segment de l’épicerie pèse 800 milliards de dollars, avec des ménages qui font leurs courses trois à quatre fois par semaine en moyenne. En près de 20 ans, Amazon a su se singulariser par son approche de l’épicerie. Comme les grandes enseignes de l’alimentaire dans les années 1980, nous avons privilégié dans un premier temps les produits vendus en supermarché hors chaîne du froid, à savoir les produits disponibles en sachets papier, les aliments en conserves ou en briques, les friandises et snacks, les aliments pour animaux, les produits de santé et d’hygiène et les produits de beauté. Pourtant, nous proposons plus de trois millions d’articles contre 30 000 dans un supermarché classique, dans les mêmes catégories de produits. Compte tenu de l’actuelle hausse des coûts de livraison, nous privilégions aussi des conditionnements plus grands. Nous sommes satisfaits par la croissance et le volume de nos ventes d’épicerie, mais nous aimerions pouvoir répondre à davantage de besoins de nos clients sur ce segment de marché. Il faudrait donc investir dans une hausse du nombre de mètres carrés et de points de vente, l’essentiel des courses de produits d’épicerie se faisant toujours en magasin. Il y a 40 ans, Whole Foods Market a inventé le concept de magasin de produits alimentaires bio et naturels. C’est aujourd’hui encore une enseigne en croissance, qui fait référence en matière d’alimentation saine et écoresponsable. L’an dernier, nous avons continué d’investir dans le développement de cette activité et dans des évolutions à même d’améliorer sa rentabilité. Whole Foods Market est sur la bonne voie, mais pour avoir un impact plus fort encore dans le secteur de l’alimentaire, il nous faut trouver un format de grande distribution déployable à grande échelle. Nous l’expérimentons depuis quelques années avec Amazon Fresh et travaillons d’arrache-pied pour identifier le format idéal de grande distribution de produits d’épicerie qui conviendrait à l’échelle d’Amazon. Pour Amazon, le potentiel de croissance sur le segment de l’épicerie est considérable.

Amazon Business est un autre exemple d’investissement où nos capacités en matière d’e-commerce et de logistique nous offrent un véritable avantage concurrentiel pour nous positionner sur ce large segment de marché. Amazon Business permet aux professionnels, entreprises, municipalités et organisations d’acheter facilement des produits, comme des fournitures de bureau et d’autres articles en vrac, à des prix très avantageux. Alors que certains pans de l’économie ont souffert ces dernières années, Amazon Business prospère. Pourquoi ? Parce que l’équipe a su créer une dynamique d’achat qui privilégie le choix, la valeur et l’aspect pratique et qui tient systématiquement compte des retours et des suggestions des clients pour innover dans leur intérêt. Certains n’ont jamais entendu parler d’Amazon Business, mais nos clients professionnels, eux, sont conquis. En activité depuis 2015, Amazon Business génère aujourd’hui un chiffre d’affaires annuel de près de 35 milliards de dollars. Plus de six millions de clients actifs, dont 96 % d’entreprises du classement Fortune 100, apprécient de regrouper leurs achats auprès d’une seule enseigne et de bénéficier des capacités analytiques en temps réel d’Amazon Business et du très large catalogue de centaines de millions de fournitures professionnelles. Nous ne sommes qu’au début de cette aventure et entendons bien répondre toujours plus aux attentes et aux besoins dont nous font part nos clients professionnels.

De nombreux commerçants et marques satisfaits de vendre leurs produits sur Amazon ont aussi lancé leur propre site Internet de vente directe aux consommateurs. Or, l’une des difficultés pour ces commerçants est de convertir les visiteurs en acheteurs. C’est pourquoi nous avons inventé Buy with Prime. Grâce à Buy with Prime, les marques et commerçants peuvent vendre les produits de leur site aux membres Amazon Prime qui bénéficient ainsi de la livraison rapide et gratuite et du paiement simplifié, comme s’ils achetaient sur Amazon. Les commerçants qui proposent Buy with Prime y trouvent aussi leur compte, puisque Amazon gère le stockage, le prélèvement, le conditionnement et la livraison de leurs produits, mais aussi le paiement et les retours, le tout via Amazon Pay et Expédié par Amazon. Le service Buy with Prime est proposé depuis peu à l’ensemble des commerçants aux États-Unis et a d’ores et déjà permis d’augmenter en moyenne de 25 % le taux de conversion sur les sites de ventes tiers. Tout le monde y gagne : les commerçants qui vendent plus et peuvent livrer plus facilement, les membres Prime qui profitent des avantages Prime sur davantage de sites marchands, et Amazon, qui peut ainsi démocratiser et améliorer l’expérience d’achat en ligne.

Il nous semble tout naturel de vouloir nous développer à l’international, de nous positionner sur de tout nouveaux segments de vente au détail encore inexplorés par Amazon et de mobiliser nos capacités uniques pour aider les commerçants à augmenter leurs ventes sur leurs propres sites Web. Nous consentons également à investir dans des segments éloignés de notre cœur de métier, mais qui revêtent un formidable potentiel. Tel a été le cas avec AWS en 2003, et c’est aussi le cas en 2023, d’Amazon Healthcare et de Kuiper.

Nos premières initiatives dans la santé ont porté sur la pharmacie, qui n’était pas très éloignée du e-commerce. Depuis des années, les clients d’Amazon, mécontents des distributeurs existants, réclamaient une pharmacie en ligne. C’est désormais le cas depuis 2020 aux États-Unis, avec Amazon Pharmacy, une pharmacie en ligne qui pratique des tarifs transparents, avec des procédures simples de renouvellement et des économies pour les membres Prime. Amazon Pharmacy connaît une croissance rapide et continue d’innover. Récemment, nous avons lancé RxPass, un forfait à 5 dollars par mois réservé aux membres Prime qui leur permet d’obtenir autant de médicaments que leur ordonnance le permet pour des dizaines de pathologies courantes, comme la tension artérielle élevée, les reflux gastriques et l’anxiété. Nos clients expriment constamment leur souhait qu’Amazon propose une meilleure solution en matière de santé, face à des dispositifs qu’ils jugent souvent inefficaces et insatisfaisants. Nous avons décidé de commencer par les soins primaires, première étape du parcours d’un patient. Nous avons étudié le paysage en profondeur et évalué plusieurs pistes, y compris nos premières expériences avec Amazon Care. Il nous est apparu que l’expérience centrée sur le patient proposée par One Medical s’avère être un excellent socle en vue du développement de notre future activité dans ce domaine, et nous avons donc annoncé en juillet 2022 l’acquisition de One Medical. En effet, les clients apprécient les services proposés par One Medical pour plusieurs raisons : l’application qui permet aux patients de discuter par chat ou en visio avec un professionnel de santé, l’existence de cabinets de ville One Medical partout aux États-Unis avec possibilité de consultation en personne le jour même ou le lendemain, ainsi qu’un réseau mis en place par One Medical dans chaque grande ville avec des spécialistes et des établissements hospitaliers locaux pour faciliter et accélérer la prise de rendez-vous. Nous sommes convaincus que One Medical et Amazon vont continuer d’innover ensemble pour changer la mauvaise image qu’ont trop souvent les soins primaires.

Kuiper est un autre exemple où Amazon innove sur le long terme pour répondre à un fort besoin des clients : la création d’un système de satellites en orbite terrestre basse pour proposer un service Internet haut débit de grande qualité aux endroits du monde qui n’y ont pas accès. En effet, plusieurs centaines de millions de foyers et d’entreprises n’ont toujours pas d’accès fiable à Internet. Imaginez ce que ces populations pourraient faire avec une connexion stable : suivre des cours en ligne, utiliser des services financiers, démarrer leur propre activité, faire des achats, se divertir. De même, les entreprises et les États pourraient améliorer la couverture du territoire et les services aux populations. Kuiper, ce sont des services plus accessibles et plus abordables. Nos équipes ont développé des antennes à bas coût (autrement dit des terminaux client) afin de réduire les freins à l’adoption. Nous avons récemment dévoilé les nouveaux terminaux qui communiqueront avec les satellites et envisageons une version résidentielle standard qui reviendrait à moins de 400 dollars l’unité. Ce sont de petits boîtiers carrés, de 28 cm de côté et 2,5 cm d’épaisseur, qui pèsent moins de 1,9 kg sans le support de fixation, pour un débit maximum de 400 mégabits par seconde, équipés de puces de bande de base conçues par Amazon. Nous prévoyons de lancer cette année deux prototypes de satellites pour tester le réseau de télécommunications et de passer en bêta, puis en commercialisation en 2024. Les réactions des clients auxquels nous avons présenté Kuiper sont à ce jour très positives. Chez Amazon, nous sommes convaincus du formidable potentiel que représente Kuiper. Il existe des similarités avec AWS : beaucoup de capital à investir au début, mais avec un très fort potentiel de clients (grand public, entreprises et États), un prévisionnel de chiffre d’affaires et de bénéfices fort, et assez peu de concurrents pouvant rivaliser techniquement, en termes d’inventivité, ainsi qu’en capacité d’investissement.

Dernier pôle d’investissement que je souhaite citer, qui contribuera aux futures inventions d’Amazon tous segments confondus sur plusieurs dizaines d’années, et qui concentre déjà des investissements massifs : Large Language Models (modèles de langage de grande taille) et l’IA générative. Voilà plusieurs dizaines d’années que l’on entend parler des promesses des technologies de machine learning, mais cela ne fait que 5 à 10 ans que les entreprises s’en emparent. Cette évolution s’explique par plusieurs facteurs, dont l’accès à des capacités de calcul inédites à des prix imbattables. Depuis 25 ans, Amazon utilise beaucoup le machine learning, pour les recommandations d’achat en ligne personnalisées, l’organisation des prélèvements d’articles dans les centres de distribution, les drones Prime Air, Alexa, les nombreux services de machine learning qu’AWS propose (AWS est le fournisseur cloud ayant le plus de clients et de fonctionnalités machine learning à disposition). Plus récemment, une nouvelle forme de machine learning, appelée IA générative, a vu le jour qui promet d’accélérer grandement l’adoption de cette technologie. L’IA générative s’appuie sur des modèles LLM (entraînés sur plusieurs centaines de milliards de paramètres à ce stade) et d’immenses bases de données, avec en plus des capacités d’apprentissage et de mémorisation d’une ampleur inédite. Amazon perfectionne depuis déjà longtemps ses modèles LLM. Nous sommes convaincus que toutes les expériences client vont s’en trouver transformées et améliorées et nous entendons bien continuer d’investir dans ces modèles pour améliorer encore les expériences proposées au grand public, aux vendeurs, aux marques et aux créateurs. Et, comme c’est le cas pour AWS depuis des années, nous cherchons à démocratiser la technologie pour que les entreprises de toute taille puissent s’emparer de l’IA générative. Avec Trainium et Inferentia, AWS propose les puces de machine learning les plus performantes et abordables pour que les entreprises, petites et grandes, puissent se permettre d’entraîner leur propre LLM et de passer en production. Nous donnons le choix entre plusieurs LLM pour que les entreprises développent leurs applications avec toutes les conditions, notamment de sécurité et de respect de la vie privée, qui font la réputation d’AWS. Nous proposons aussi des applications, comme AWS CodeWhisperer qui génère des suggestions de code en temps réel et accroît ainsi nettement la productivité. J’aurais pu consacrer toute une lettre aux modèles LLM et à l’IA générative tant je crois en leur pouvoir transformateur, mais ce sera pour une prochaine fois. Disons pour le moment que les LLM et l’IA générative vont radicalement changer la donne pour nos clients, pour nos actionnaires et pour Amazon.

Pour conclure, je suis confiant quant à notre capacité à ressortir plus forts encore de ces temps difficiles sur le plan macroéconomique. Je viens de vous donner plusieurs exemples en ce sens. Mais deux statistiques relativement simples confirment les immenses débouchés qui s’annoncent. Si Amazon compte 434 milliards de dollars de chiffre d’affaires grand public en 2022, il faut savoir que la grande majorité du chiffre d’affaires de la vente de détail au niveau mondial est toujours réalisée par les points de vente physique (environ 80 %). Et il en est de même pour les dépenses en Informatique au niveau mondial, segment où le chiffre d’affaires d’AWS est de 80 milliards en 2022, et sur lequel 90 % des dépenses concernent des environnements sur site qui n’ont pas encore migré vers le cloud. Ces équations étant progressivement amenées à s’inverser, ce que nous constatons d’ailleurs déjà, nous sommes convaincus que l’excellence de nos expériences client, notre goût immodéré pour l’invention, notre attention portée au client et nos efforts vont se traduire par une formidable croissance au cours des prochaines années. Et c’est même sans compter les autres activités et expériences proposées par Amazon et qui n’en sont qu’à leurs prémices.

Je n’ai aucun doute sur le fait que le meilleur est à venir et je me réjouis de collaborer avec l’ensemble des équipes d’Amazon pour qu’il en soit ainsi.

Bien à vous,

Andy Jassy
Président-directeur général
Amazon.com, Inc.

P.S. Comme chaque année, nous joignons ci-après notre première lettre aux actionnaires datant de 1997 : tout ce qui y est écrit est toujours vrai et d’actualité.

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À nos actionnaires :

Amazon.com a franchi de nombreuses étapes importantes en 1997 : en fin d’exercice, nous avions servi plus de 1,5 million de clients, générant une hausse du chiffre d’affaires de 838 % pour atteindre 147,8 millions de dollars, et nous avons étendu notre position de leader sur le marché malgré une concurrence rude à l’entrée.

Or, aujourd’hui est le Jour 1 pour Internet, et, si nous nous y prenons bien, pour Amazon.com. Aujourd’hui, le commerce en ligne permet aux clients d’économiser de l’argent et un temps précieux. Demain, grâce à la personnalisation, le commerce en ligne va accélérer le processus même de découverte de produits. Amazon.com s’appuie sur Internet pour créer une véritable valeur pour ses clients et, ce faisant, espère créer une enseigne pérenne, même sur de vastes marchés bien établis.

Nous disposons bel et bien d’un créneau à prendre, dans un contexte où les grands acteurs sont en train de mobiliser les ressources nécessaires pour se positionner en ligne et que les clients, novices en matière d’achats sur Internet, accueillent volontiers de nouveaux partenaires. Le paysage concurrentiel continue d’évoluer à un rythme rapide. Nombre de grandes enseignes arrivent en ligne avec des offres crédibles et consacrent beaucoup d’énergie et de ressources à faire connaître leur site, à augmenter le nombre de visiteurs et à y effectuer des ventes. Notre objectif est d’agir rapidement afin de consolider et d’étendre notre position actuelle tout en commençant à explorer les possibilités de vente en ligne dans d’autres domaines. Les marchés importants que nous visons présentent des débouchés considérables. Cette stratégie n’est pas sans risque : elle nécessite d’investir sérieusement et d’agir sans flancher face aux enseignes déjà bien installées.

Tout est question de long terme

Selon nous, l’indicateur le plus fondamental de la réussite d’Amazon sera la valeur créée à long terme pour les actionnaires, qui sera directement le fruit de notre capacité à étendre et à consolider notre position actuelle de leader sur le marché. Plus ce leadership sera fort, plus notre modèle économique sera puissant. Être le leader du marché peut se traduire directement par un chiffre d’affaires plus élevé, une meilleure rentabilité, une plus grande vitesse de capitalisation et, par conséquent, des rendements plus élevés sur le capital investi.

Nos décisions ont toujours été prises avec cet objectif en vue. Nous mesurons d’abord nos performances au regard des indicateurs les plus révélateurs de notre position de leader : la croissance du nombre de clients et du chiffre d’affaires, le taux de fidélisation de nos clients et la force de notre marque. Nous avons investi et continuerons d’investir avec énergie afin de développer et de valoriser notre clientèle, notre marque et notre infrastructure avec l’intention de devenir une enseigne pérenne.

Puisque nous misons sur le long terme, nous sommes susceptibles de prendre des décisions et d’accepter des compromis auxquels rechigneraient certaines entreprises. Nous tenons donc à vous faire part de notre approche fondamentale de la gestion et de la prise de décisions pour que vous, nos actionnaires, puissiez valider qu’elle est conforme à votre philosophie d’investissement :

· Nous continuerons de nous concentrer sans relâche sur nos clients.

  • Nous continuerons de prendre des décisions qui vont dans le sens d’un leadership à long terme plutôt que de la rentabilité ou des réactions des marchés boursiers à court terme.
  • Nous continuerons d’évaluer et d’analyser l’efficacité de nos programmes et de nos investissements, de façon à abandonner ceux qui n’offrent pas un rendement acceptable et à intensifier nos investissements les plus rentables. Nous continuerons d’apprendre systématiquement de nos succès et de nos échecs.
  • Nous prendrons des décisions d’investissement audacieuses plutôt que timides chaque fois qu’elles présenteront une probabilité suffisante d’asseoir notre leadership sur le marché. Certains de ces investissements seront rentables, d’autres pas, et nous en tirerons de précieux enseignements quoi qu’il en soit.
  • Entre optimiser l’apparence de notre comptabilité et maximiser la valeur actuelle de notre future trésorerie, nous privilégierons toujours la trésorerie.
  • Nous vous informerons de nos réflexions stratégiques en cas de choix audacieux (dans la mesure où les pressions concurrentielles le permettent), afin que vous puissiez évaluer par vous-même s’il s’agit d’investissements rationnels à long terme au service de notre leadership.
  • Nous veillerons à dépenser raisonnablement et à conserver notre culture de l’agilité. Nous savons l’importance de maintenir une culture de la maîtrise des coûts, surtout dans une activité qui subit des pertes nettes.
  • Nous veillerons à concilier l’importance de la croissance avec la rentabilité à long terme et la gestion du capital. À ce stade, nous choisissons de privilégier la croissance, car nous sommes convaincus que l’échelle de notre entreprise est essentielle pour permettre à notre modèle économique de déployer tout son potentiel.
  • Nous continuerons de privilégier le recrutement et la fidélisation de collaborateurs polyvalents et compétents, et compléterons leur rémunération par des options d’achat d’actions plutôt que par du numéraire. Nous le savons : notre réussite dépendra en grande partie de notre capacité à attirer et à fidéliser des collaborateurs motivés, soucieux autant qu’un patron des résultats de l’entreprise.

Nous n’irons pas jusqu’à dire qu’il s’agit là de la philosophie d’investissement « parfaite », mais c’est la nôtre, et nous manquerions à notre devoir en n’étant pas clairs quant à l’approche que nous adoptons et que nous continuerons d’adopter.
Les bases étant posées, passons au bilan de nos priorités commerciales, aux progrès enregistrés en 1997 et à nos perspectives d’avenir.

L’obsession pour les clients

D’emblée, nous avons voulu proposer à nos clients un rapport qualité-prix incontestable. Nous nous sommes rendu compte qu’Internet était et reste encore le « World Wide Wait ». Nous avons donc décidé de proposer aux clients ce qu’ils ne pouvaient tout simplement pas se procurer ailleurs, en commençant par les livres. Nous avons mis à leur disposition une sélection bien plus large que celle de n’importe quel magasin physique (l’équivalent de 4,5 terrains de football), dans un format pratique, facilement interrogeable et convivial, et dans une boutique ouverte 365 jours par an et 24 heures sur 24. Bien décidés à améliorer l’expérience d’achat, nous avons considérablement amélioré notre site de vente en 1997. Les clients bénéficient ainsi de chèques-cadeaux, des achats en 1 clic, et de nombreuses autres fonctionnalités d’avis, de contenus, de choix de navigation et de recommandations. Nous avons considérablement baissé les prix, pour toujours plus de valeur au service du client. Le bouche‑à‑oreille reste l’outil d’acquisition de clients le plus puissant à notre disposition, et nous sommes reconnaissants de la confiance que nos clients nous accordent. Ensemble, les achats réguliers et le bouche‑à‑oreille ont fait d’Amazon.com le leader du marché de la vente de livres en ligne.

À bien des égards, Amazon.com a réalisé des prouesses en 1997 :

  • Le chiffre d’affaires est passé de 15,7 millions de dollars en 1996 à 147,8 millions de dollars, soit une hausse de 838 %.
  • Le nombre de comptes clients est passé de 180 000 à 1 510 000, soit une hausse de 738 %.
  • Le pourcentage de commandes de clients réguliers est passé de plus de 46 % au 4e trimestre 1996 à plus de 58 % sur la même période en 1997.
  • En termes d’audience, selon Media Metrix, notre site Web, qui figurait en 90e place, est désormais dans le top 20.
  • Nous avons mis en place des relations durables avec de nombreux partenaires stratégiques importants, dont America Online (AOL), Yahoo!, Excite, Netscape, GeoCities, AltaVista, @Home et Prodigy.

Infrastructure

En 1997, nous avons travaillé d’arrache-pied pour faire évoluer notre infrastructure commerciale afin d’absorber la forte augmentation du trafic, du chiffre d’affaires et des services :

· L’effectif d’Amazon.com est passé de 158 à 614 collaborateurs et nous avons considérablement étoffé notre équipe de direction.

· Notre superficie de centres de distribution est passée de 4 600 m2 à 26 500 m2, avec notamment 70 % de surface en plus sur nos sites de Seattle et l’ouverture de notre deuxième centre de distribution dans le Delaware en novembre.

· Le stock de livres comptait plus de 200 000 titres en fin d’année, ce qui nous a permis d’améliorer la disponibilité pour nos clients.

· Notre solde de trésorerie et nos immobilisations en fin d’exercice s’élevaient à 125 millions de dollars, grâce à notre introduction en bourse en mai 1997 et à notre emprunt de 75 millions de dollars, ce qui nous confère une grande souplesse stratégique.

Nos collaborateurs

La réussite enregistrée cette année est le fruit du travail, du talent et de l’intelligence de nos équipes, dont je suis très fier de faire partie. Placer haut la barre du recrutement a été, et continuera d’être, le vecteur le plus important de réussite d’Amazon.com.

Travailler chez nous n’est pas facile (en entretien, je dis aux candidats : « Vous pouvez travailler longtemps, dur ou intelligemment, mais chez Amazon.com, vous ne pouvez pas choisir deux options sur trois »), mais nous œuvrons au service d’une mission importante, qui compte pour nos clients et dont nous pourrons tous parler à nos petits-enfants. De telles ambitions n’ont rien de facile. Nous avons la chance de pouvoir compter sur le dévouement, les sacrifices et la passion de nos collaborateurs pour construire ensemble Amazon.com.

Objectifs pour 1998

Il reste encore fort à faire sur les moyens d’offrir à nos clients toujours plus grâce au commerce et à la promotion sur Internet. Notre objectif reste de consolider et de développer notre marque et notre clientèle. Pour ce faire, il faudra investir durablement dans des systèmes et des infrastructures permettant de proposer aux clients de la praticité, une sélection et des services exceptionnels à mesure qu’Amazon.com se développe. Nous prévoyons d’élargir notre offre de produits à la musique puis, progressivement et toujours avec prudence, à d’autres produits porteurs. Nous sommes aussi convaincus qu’il est possible de mieux répondre aux besoins de nos clients étrangers, avec des délais de livraison plus courts et une expérience client plus adaptée. Une chose est sûre : ce ne sont pas les pistes de développement qui manquent, à nous de définir nos priorités d’investissement.

Si nous connaissons aujourd’hui bien mieux le commerce en ligne qu’à la création d’Amazon.com, il nous reste encore beaucoup à apprendre. Malgré l’optimisme, nous devons rester vigilants et conserver un sentiment d’urgence. Nous devrons affronter de nombreux défis et obstacles pour pouvoir concrétiser l’ambition à long terme d’Amazon.com : une concurrence agressive, compétente et bien financée ; des enjeux de développement avec des risques d’exécution considérables ; des risques liés à la hausse du nombre de produits et au développement géographique ; et le besoin d’investissements lourds et constants pour répondre à la croissance du marché. Comme nous le disons depuis longtemps, la vente de livres en ligne et le commerce en ligne s’avéreront sans nul doute des marchés très prometteurs qui ne manqueront pas d’attirer un certain nombre d’entreprises. Nous sommes heureux du chemin déjà parcouru et plus enthousiastes encore quant à ce que nous voulons entreprendre.

L’année 1997 aura effectivement été incroyable. Chacun d’entre nous chez Amazon.com remercie nos clients pour la confiance qu’ils nous accordent par leurs achats, nos collègues pour le travail acharné accompli, et envers nos actionnaires pour leur soutien et leurs encouragements.

Jeffrey P. Bezos
Fondateur et président-directeur général
Amazon.com, Inc.